La Croix n°37863, 28 septembre 2007
Moyennant finances, les «doulas» proposent aux femmes enceintes de les accompagner dans leur grossesse.
Pierre Bienvault
Le «coaching» des femmes enceintes va-t-il se développer en France ? Cette question préoccupe les gynéco-obstétriciens et les sages-femmes qui ont en ligne de mire les «doulas», des femmes qui, sans formation médicale et moyennant une rémunération forfaitaire, accompagnent de futures mères.
Selon l’association Doulas de France, le concept est apparu dans les années 1970 aux États-Unis. Le mot doula, issu du grec, désignait alors des «femmes qui aidaient et soutenaient des mères pendant la période postnatale autour de l’allaitement». Aujourd’hui, il y aurait environ 2 400 doulas aux États-Unis et 250 en Grande-Bretagne. En France, on en recense 42 en exercice et 150 en apprentissage. «Ces femmes ont suivi des formations à l’étranger ou en France, auprès de quelques sages-femmes», indique Pascale Gendreau, coprésidente de Doulas de France. En 2006, 138 grossesses sur plus de 800 000 ont été accompagnées par une doula, dont 34 % à domicile.
Les doulas ont en commun le fait d’avoir déjà accouché et, le plus souvent, déjà allaité. Grâce à cette expérience, elles se proposent d’apporter un «soutien physique et émotionnel» à des couples avant, pendant et après l’accouchement. D’être des «compagnes de route» qui vont «materner la mère». Sans jamais intervenir sur le plan médical. «Nous ne revendiquons aucune compétence dans ce domaine», précise Pascale Gendreau, qui récuse également le terme de «coach». «Nous n’imposons aucune méthode à suivre, ajoute-t-elle. Nous ne faisons qu’accompagner les femmes en respectant leurs envies et leurs besoins. Une doula peut par exemple répondre à des questions sur la sexualité pendant la grossesse ou sur ce qu’il faut faire face à un bébé qui pleure. Mais elle peut aussi préparer les repas, faire une machine ou s’occuper des autres enfants au retour de la maternité.»
Pour l’instant, les doulas n’ont aucune existence officielle en France. «Nous ne sommes pas inscrits au registre des métiers. Mais nous avons fait une demande auprès du ministère de la famille pour obtenir une certification de la formation de 32 jours que nous souhaitons mettre en place», indique Pascale Gendreau. Les doulas, en échange de leurs services, réclament le plus souvent un forfait de 500 €.
Cette activité n’est pas vue d’un très bon oeil par les professionnels de la naissance. Le simple fait d’avoir accouché et allaité ne «donne pas compétence à s’occuper d’autres femmes», soulignent, dans un communiqué commun, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et le Collège national des sages-femmes (CNSF). «Les doulas sont une mauvaise réponse à un vrai problème. Aujourd’hui, beaucoup de femmes enceintes sont à la recherche d’un suivi plus individuel et moins stéréotypé qu’elles ne trouvent pas toujours dans les grandes maternités», indique Frédérique Teurnier, présidente du CNSF. «Le problème est que les sages-femmes, qui sont des professionnelles de santé spécifiquement formées pour assurer cet accompagnement des couples, ne sont pas assez nombreuses, ajoute-t-elle. Plutôt que de créer un nouveau métier, il faudrait donner aux sages-femmes les moyens d’accompagner les futures mères.»
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