Nathalie propose depuis 2015 un accompagnement non-médical aux femmes enceintes. Autrement dit, elle est doula.
Rencontrer Nathalie, c’est plonger dans un univers empreint de bienveillance centré sur le bien-être de la femme. Assistante maternelle à Étoges dans la Marne, elle est aussi la seule doula du département.
« Doula ». Un mot mystique qui nous vient tout droit de la Grèce antique. « Cela signifie « servante ». Dans les temps anciens, une doula était au service de la maîtresse de maison. » De nos jours, la notion de servitude a été remplacée par celle du service, aux futures mamans.
Oreille attentive
De la grossesse à la naissance, puis pendant les premiers mois de vie, Nathalie accompagne des mères, les « écoute sans les juger », les « aiguille sans les conseiller » afin de mener à bien leur projet de naissance. Une écoute bienveillante pour que les femmes « déposent » ce qu’elles ont sur le cœur. « Je suis un gros panier », plaisante la trentenaire.
Au coin du feu, tasse de thé à la main, les séances d’accompagnement ressemblent à un après-midi entre copines. « Ça fait du bien de se faire chouchouter », s’exclame Hélène. Maman de quatre enfants, cette vendeuse indépendante rencontre régulièrement Nathalie depuis que son petit dernier est entré dans sa vie. « Lors de mes précédentes grossesses, j’avais ressenti ce manque d’accompagnement. Je souhaitais trouver une oreille attentive. » Et discrète, la doula est tenue au secret professionnel.
Une « boussole »
Mère de trois enfants et assistante maternelle, Nathalie sait y faire avec les tout-petits mais elle insiste, « je ne donne pas de conseils médicaux et je ne pratique aucun acte médical. J’encourage d’ailleurs les femmes à être suivie par une sage-femme ». Quand une femme s’inquiète de la santé de son bébé, elle l’oriente vers un professionnel. « Je suis un peu une tisseuse de liens. » Des contacts qu’elle accumule au gré des retours d’expérience de ses accompagnées. « Nathalie est un peu une boussole », résume Hélène.
Combler un manque
« On ne va pas se mentir, les doulas comblent une brèche : le manque de temps du monde médical », analyse Hélène. Une carence à l’origine de la vocation de Nathalie. « Les soignants n’ont pas toujours le temps de répondre à toutes nos questions lors des rendez-vous. On se demande aussi si notre question n’est pas stupide de peur d’être jugée. »
Pour cette « amoureuse des femmes enceintes », la maternité n’est pas valorisée dans notre société. « C’est une période clé dans la vie d’une femme et elle se résume bien souvent à une liste d’examens. » Des procédures froides accentuées par l’éloignement des familles, « des femmes se retrouvent isolées ».
Mode doula activé
Son métier, Nathalie l’a appris au cours d’une formation dispensée par un organisme spécialisé. « On voit le projet de naissance, les bases de l’allaitement, la sexualité. » Au bout de 144 heures de cours, elle endosse officiellement le titre de doula et s’engage à respecter la charte éthique de l’association Doulas de France.
Si, de son aveu, ses débuts en tant que professionnelle se sont faits « naturellement », il n’est pas toujours facile de se retrouver dans de bonnes dispositions. « Au début c’était compliqué, maintenant j’arrive facilement à me mettre en mode doula. »
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Combien coûte une doula ?
Les doulas sont rémunérées directement par les parents. Il n’existe pas de grille de tarif propre à la profession de doula. Chaque professionnelle fixe ses tarifs. L’association Doulas de France se risque néanmoins à donner une fourchette de prix : 40 € à 70 € pour les visites et de 150 € à 300 € pour les accouchements.
Ces interventions ne sont pas remboursées par la Sécurité sociale. « Par contre, l’accompagnement de la doula s’inscrit dans le cadre du service à la personne et les parents peuvent la rémunérer via le système du CESU (Chèque Emploi Service Universel) ou aussi du CESU préfinancé qui permet aux parents de bénéficier d’une déduction d’impôt ou d’un crédit d’impôt », précise Doulas de France.
Le métier de doula est-il reconnu ?
À l’heure actuelle, aucun statut n’a été créé pour réglementer et officialiser la profession de doula.
Quelles précautions prendre pour choisir sa doula ?
Nathalie a suivi sa formation avec Doulas de France (DDF). Cet organisme a rédigé une charte éthique que doivent signer les doulas référencées dans son annuaire. Afin être en conformité avec la législation française, les DDF posent des conditions :
Ne peut pas être présente pendant le travail et l’accouchement sans qu’une sage-femme ou un médecin ne soit présent.
Ne pas établir un suivi médical de grossesse ou pratiquer un accouchement.
Ne peut pas accompagner les mères, les couples, qui n’ont pas mis en place un suivi médical par une sage-femme ou un médecin.
Le rôle d’accompagnante est parfois contre-nature. « On doit écouter pour comprendre et non pas écouter pour répondre. C’est tentant de dire ‘c’est pas grave’ pour rassurer. Seulement parfois, c’est tout aussi constructif pour le bien-être de la mère de reconnaître qu’une situation était compliquée et qu’elle a eu raison de s’inquiéter. Il est important de rassurer les femmes sur leur instinct de mère », insiste la Champenoise.
Un point que ne saurait contredire Hélène. La jeune maman a retrouvé confiance en elle. « Elle appuie sur certains points que je n’avais pas relevés et cela m’aide à mieux comprendre ma situation ».
Service personnalisé
Nathalie suit principalement des femmes, mais il lui arrive de recevoir les couples et de s’entretenir avec les papas pour « faire un point sur leur rôle de père ». La fréquence des séances et leur durée s’adaptent à la demande des parents.
Ses missions peuvent dépasser le cadre du soutien psychologique. La Marnaise a ainsi été appelée lors d’un accouchement à la maison. « Un moment magique » où elle s’est d’abord occupée du fils aîné, puis est venue soutenir la maman lors du travail avant de terminer par un brin de ménage.
[su_spoiler title= »Lire aussi : Un souvenir inoubliable pour Nathalie » style= »fancy » icon= »plus-circle »]Quand on interroge Nathalie sur le meilleur souvenir de sa jeune carrière de doula, elle répond sans hésiter : « C’était au mois de juin 2017 dans l’Aisne. Une maman que j’accompagnais depuis la grossesse avait prévu d’accoucher à domicile. Avant le jour-J, j’étais un peu stressée, je ne savais pas si j’allais être disponible quand le moment viendrait (Nathalie est assistante maternelle, NDLR), je redoutais d’arriver en retard et surtout j’ignorais si la sage-femme serait déjà présente à mon arrivée (Nathalie a signé une charte où elle s’engage à assister à un accouchement uniquement en présence d’un personnel médical, NDLR).
Une fois arrivée, j’étais émerveillée par l’ambiance magique de la maison. Les rideaux étaient tirés, il y avait des bougies dans la maison et une piscine au milieu du salon. On sentait qu’il allait se passer quelque chose de miraculeux.
Rapidement, j’ai constaté que la maman était perturbée par les allées et venues du fils aîné. J’ai décidé de l’emmener jouer au parc quelques heures. Une fois rentré, je l’ai fait manger et le papa l’a couché.
Quelque temps après, la maman m’a appelée pour que je sois à ses côtés pendant le travail. J’étais très heureuse et surtout honorée. Pendant tout l’accouchement, je lui glissais des mots à l’oreille. J’ai guidé le papa pour qu’il soutienne sa femme. À un moment où les douleurs étaient intenses, je lui ai dit de regarder son bébé afin qu’elle se concentre sur l’essentiel.
Une fois le bébé mis au monde, je me suis rendue utile en rangeant la piscine et les bâches installées. J’étais comme une petite femme de l’ombre qui veille à ce que tout se passe bien.
Plus tard, ce couple m’a exprimé sa reconnaissance. On est d’ailleurs toujours en contact. »
Un rôle parfois « fatigant ». Des accompagnements difficiles nécessitent le soutien des consœurs. Pour autant, Nathalie sait qu’elle « est doula ». Toujours prête à accueillir avec le sourire et à ouvrir ses bras pour une embrassade appuyée.